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Critique

«L'action du cinéma français se joue dans la langue»

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publié le 30 avril 2008 à 3h16

Le Complexe de Cyrano (la langue parlée dans les films français) de Michel Chion. Editions Cahiers du Cinéma, collection Essais, 90 pp., 25 euros.

Critique, enseignant (à l'Esec et à Paris III), compositeur, Michel Chion est un type qui a largement autant écouté le cinéma qu'il ne l'a vu. De Tati à Lynch et de Chaplin à Kubrick, en passant par Terrence Malick et Andreï Tarkovski, il a écrit sur quelques cinéastes remarquables en favorisant toujours le son à l'image. Son dernier livre, le Complexe de Cyrano, est une synthèse troublante sur notre cher cinéma français, perçu à travers ses dialogues, ses mots, son langage ou ses langages. Ce que Michel Chion a entendu dépasse de loin la question des «niveaux de langue» et des sociotypes qui y sont d'ordinaire associés. Passant un à un en revue une trentaine de films français tous plus ou moins emblématiques, de Sous les toits de Paris (René Clair, 1930) à Flandres (Bruno Dumont, 2006), Chion lève plusieurs lièvres passionnants.

Il montre d'abord combien il existe une «langue française à l'écran», qui n'existe qu'au cinéma et a bien peu de choses à voir avec le français «réel». Il fait jaillir ensuite la figure d'un personnage qui hante tout le cinéma de ce pays : le perdant magnifique et verbeux, dont Cyrano de Bergerac est la matrice et Brice de Nice l'un des derniers héritiers. Enfin, il tisse un réseau de correspondances brillantes et inattendues, voire très osées pour le paysage critique con