Costumes sombres, trop vieux pour eux, Alexandre et Mickaël ressemblent à deux pingouins en manque de banquise. Ils attendent, les mains croisées sur les cuisses, une forme de providence. Sur la table ronde, des flyers et un ordinateur. L'oeil scrute les va-et-vient, les démarches hésitantes, les regards à harponner. Au Short Film Corner, il faut saisir la moindre péripétie. Situé au sous-sol du Palais des festivals, dans l'antre du marché du film, le Short Film Corner se veut depuis 2004 le lieu de rencontres incontournable des professionnels du court-métrage. «Créateurs de films courts, montrez-vous ! Vous réalisez des films avec le brûlant désir d'aller vers le long ?» disait le pitch.
«Paupières». Alexandre Lampron et Mickaël Gouin, le réalisateur Jean-François Lavallière et un quatrième acolyte, ont pris un long-courrier. Montréal-Cannes via Paris. Il faut ce qu'il faut quand on cherche un distributeur. Tenter sa chance dans un des plus grands festivals au monde n'est pas forcément stupide. Surtout quand on peut y être logé à l'oeil. Papier-pressé (14 mn), leur premier «court métrage d'envergure», leur a pris un an, zéro dollar de budget. Mickaël, scénariste et acteur principal, montre la bande-annonce. «Un homme qui vit dans une ville où la conformité est un mode de vie, voit son existence chamboulée par la découverte d'un billet de cinq dollars. Le vent l'emporte et il se met à courir», raconte le créateur dont l'univers s'inspire de Magritt