Arnaud Desplechin parle tout bas. Il ne le fait pas exprès, mais ne tente rien pour monter le son. Dans le tumulte permanent de Cannes, cette particularité peut transformer tout interlocuteur, même très attentif, en semi-handicapé sourdement angoissé à l'idée de manquer un mot, une idée, voire un sous-entendu dissimulé dans le chuchotement. Mais le murmure permet aussi de perpétuer l'effet du film, où l'ambiguïté des situations et des sentiments ne cesse de s'épaissir jusqu'à la dernière image.
«Dingues». Un conte de Noël part de la lecture d'un livre écrit par Jacques Ascher, un psychanalyste lillois, la Greffe, entre la psychanalyse et la biologie.«Je le connais, c'est un ami de mon père. Il l'a écrit avec un oncologiste et il parle des effets produits par les mécanismes de la greffe de moelle osseuse sur les patients. Dans la mesure où ce type d'interventions ne peut être réalisé qu'entre membres proches d'une même famille, cela déclenche des dysfonctionnements incroyables. Ça les rend littéralement dingues.» Arnaud Desplechin dit ça avec un sourire fendu jusqu'aux oreilles, manifestement ravi que la science lui fournisse l'alibi irréfutable de ce sujet taillé sur mesure. «Le film explore ces désordres psychiques des personnes qui s'interrogent sur qui est compatible avec qui, qui transmet la maladie à qui et sur l'origine du mal. Mais une famille, c'est fait pour dysfonctionner. Si on fait un film sur l'armée, son organisation, sa hiérarchie, les l