Coincé entre les cinémas indien et indonésien, deux poids lourds industriels, le cinéma philippin s'est résumé, longtemps, à un nom : Lino Brocka. Ce n'est pas la première fois qu'un pays a pour seul cinéaste d'envergure quelqu'un dont le génie déborde les dimensions étroites que lui propose sa terre natale.
Les Philippines étaient le beau souci de Brocka, son grand sujet, il y a peut-être aussi laissé beaucoup d'énergie. Sa richesse plastique était capable de rivaliser avec des fous furieux comme Glauber Rocha ou Pasolini, le sens du mélodrame en plus. Il a signé une quarantaine de films, dont le sublime Insiang, avant de disparaître prématurément, à 52 ans, en 1991. Depuis, les films de Brocka sont invisibles (il existe un coffret de trois DVD à Manille, à la qualité d'image douteuse qui en dit long sur l'état des copies restantes). Derrière Brocka, c'est tout le cinéma philippin qui, hors frontière, a sombré. Plus rien dans les festivals. Jusqu'à ces deux dernières années, où il semblerait que, tout à coup, Manille soit l'épicentre de la création en Asie du sud-est. La chance cette fois, c'est qu'il n'est plus question d'un génie isolé, épuisé parmi un océan de films commerciaux ineptes, car désormais les Philippines possèdent au moins deux cinéastes d'avant-garde, reconnus en l'espace de quelques mois : Brillante Mendoza et Raya Martin. Du second - qui sera présent à Marseille et dont A Short Film About the Indio Nacional sera présenté à Paris Cinéma quelque