Wayne Wang a sous la main une définition bien rodée quand on lui demande d'évoquer sa petite manie de réaliser deux films au lieu d'un. «Le projet de départ implique toujours des choix parfois difficiles de scénario. De sorte que je ressens le besoin de poursuivre le travail avec un autre film dans la continuité, plus improvisé. Le premier serait comme une partition très écrite, disciplinée et le second, comme du jazz.»
Cette charmante originalité lui a déjà permis de faire deux fois ce coup-là. Dans les années 80 avec Eat a Bowl of Tea et Life is Cheap. But Toilet Paper is Expensive, puis dans les années 90, Smoke et Brooklyn Boogie avec la complicité de Paul Auster. Wayne Wang remet ça avec un diptyque inspiré des fictions de Yiyun Li, écrivaine américaine d'origine chinoise, qui évoquent la fracture culturelle de la Chine et de sa diaspora. Un thème forcément intime pour ce réalisateur de presque 60 ans, qui a quitté son pays natal à 18 ans pour étudier le cinéma aux Etats-Unis avant d'y faire carrière.
Passé évanoui. Le film «discipliné» est Un millier d'années de bonnes prières pour lequel le cinéaste a choisi le cadre empesé d'une banlieue américaine aussi proprette que déprimante, où vit une jeune Américaine d'origine chinoise. Elle accueille pour la première fois son père qui a fait le voyage pour visiter la belle Amérique et pour vérifier si sa progéniture s'en sort correctement.
Entre elle, paralysée par l'irruption d'un passé