Un solarium bombardé de musiques et une pelleteuse cahotante au crépuscule. Entre ces deux plans, courent 2h15 tendues et précipitées vers l’issue fatale sur une plage glauque. Le voyage sans retour de Matteo Garrone dans l’empire de la Camorra, la mafia napolitaine, relève de la plongée en apnée tant l’urgence de la survie irrigue les cinq récits qui s’entrecroisent dans ce film polyphonique et sobre dans sa forme. En acquérant, dès le printemps 2006, les droits du livre de Roberto Saviano, le producteur Domenico Procacci avait pressenti à juste titre la puissance évocatrice de ce roman-enquête bouleversant dont les ventes avoisinent aujourd’hui les 2 millions d’exemplaires dans trente-trois pays. Et qui a valu à Roberto Saviano, depuis deux ans, le succès mérité et les menaces de mort répétées de la Camorra. Anonymes. L’adaptation que signe Garrone n’est donc pas étrangère au livre. Mais là où l’ouvrage dénonce avec force des faits, liste des crimes et décrit des scènes folles, le film se concentre habilement sur cinq histoires d’anonymes pris dans l’engrenage de la mafia, dans cette cannibalisation des habitants de Scampia, banlieue au nord de Naples. Sans verser dans le documentaire militant. Un temps, «à la manière du Décalogue de Kie?lowski», le jeune réalisateur a imaginé une adaptation en «dix épisodes que la télévision aurait diffusés pour restituer la richesse et la complexité du livre». Non sans regret, il a finalement resserré son récit qu’il présente aujourd’h
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