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Critique

Bonello, jouir et laisser mourir

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Stèle. Après «Tiresia», le cinéaste signe un film risqué sur le deuil.
publié le 1er octobre 2008 à 18h33
(mis à jour le 1er octobre 2008 à 18h33)

C'est peut-être l'œuvre au noir de Bonello. Le moment le plus délicat dans une filmographie, l'opération alchimique où il faut tout dissoudre pour atteindre l'or pur, se remettre en question pour libérer l'esprit de ses préjugés. On pouvait regretter (mais c'était consubstantiel à leurs sujets) quele Pornographe laissât à désirer ou que Tiresia ne tînt pas vraiment ensemble. De la guerre, en revanche, s'enfonce bravement dans la forêt, fascine de bout en bout, fait jouir au sens où le tragique, loin d'être malheureux, est un éclat de joie.

Cercueils. C'est Nietzsche qui le dit, mais on va quand même vous passer une couche de Clément Rosset par-dessus, car la lecture de la Philosophie tragique accompagne parfaitement De la guerre, beaucoup mieux que le livre dont il porte pourtant le nom et la marque, le De la guerre de Clausewitz. Rosset : «Voici la finalité prioritaire que l'on découvre dans nos fêtes, et voilà pourquoi on y est si heureux, si attentif : un beau duel et un bel ennemi, dont la puissance infinie nous révèle notre puissance infinie, puisque nous y résistons, puisque nous ne sommes pas encore morts ! Car nous devrions être morts, écrasés, depuis longtemps : notre constatation de non-décès, qui est au cœur de notre fête, nous ouvre des horizons infinis sur notre propre valeur : voilà qui est enivrant, voilà pourquoi on est graves à nos fêtes, même au sein du rire.» Cela résume parfaitement l'économie du film : que la lé