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Libération
Critique

Vision d’aurore

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Avec «la Frontière de l’aube», Philippe Garrel nous expose à la lumière noire de la passion pure. Laura Smet est fascinante, entre femme fatale et fantôme charnel.
publié le 8 octobre 2008 à 6h51
(mis à jour le 8 octobre 2008 à 6h51)

Les cheveux relevés, pour nepas prendre l'eau du bain, une jeune femme refuse que son amant fasse une photographie. «Pas comme ça.» Pas en douce.Pas la nuque. Qu'elle soit actrice et qu'il soit photographe n'y change rien. Qu'ils se soient rencontrés sur une image à faire et qu'ils aient été foudroyés d'un flash amoureux n'autorise pas la surexposition. Ce que l'amour se donne d'intime, le dehors n'y a pas droit : l'impudeur leur appartient.

Visitations. François et Carole s'aiment dans un appartement aux volets clos, qui est celui du mari de Carole (en voyage, pour longtemps), dans des chambres d'hôtel impersonnelles, dans des parcs à l'abri des regards. Le cercle du décor garrelien n'a guère changé en quarante ans. La frontière est là : des endroits qui sont leur domaine réservé, où il n'y a pas de place pour trois. Il n'y a désormais que le spectateur, tapi dans l'ombre, pour les épier et les entendre - et la salle de bain est d'un blanc éclaboussant ce soir quand soudain Carole avoue à François, que «parfois, elle fait des bêtises». Des bêtises qui l'envoient dans de profonds comas. Carole, anxieuse et suicidaire. Jusqu'à poser une question terrible : «M'aimerais-tu encore si j'étais folle ?» François prend peut-être peur et Carole est internée. L'amour, brutalement, devient lettre morte. Le corps de Carole se jette par terre - alcool, maux d'amour et médication : à jamais.

François réapprend à vivre. Une autre jeune fille, Eve,