Werner Schroeter n'apprécie guère le titre français de son dernier film, gardé par la production par fidélité à la traduction française du livre de Juan Carlos Onetti dont il est une adaptation. Il lui préfère incontestablement le titre hispanique, l'original (Onetti était uruguayen), Para esta noche. «Ça dit mieux l'importance du moment présent. Moi, je ne me retourne jamais.»
On peut tenir Werner Schroeter pour un des plus grands cinéastes en activité et ne pas être toujours d'accord avec lui : Nuit de chien est un beau titre, aussi, qui dit autre chose : la meute qui rôde, des nuits à aboyer avec les plus forts, pas toujours les mêmes d'un soir à l'autre, des alliances chiennes, et traîtres, et puis quelques bas instincts humains, du côté du caniveau et des bas-fonds du rêve, ceux qui vous emmènent tout droit au cabaret. Tout cela, d'ailleurs, est dans le film qui ne ressemble à aucun autre : raffiné, insolent, opératique, lyrique, sensuel. Ténébreux et libéré.
Putains fatales. Un film que l'on observe faire, avant d'y plonger, intrigué par cette façon de saboter les repères du temps : atmosphère noire des dernières heures du fascisme, taxis-berlines remontant le quai sur lequel est amarré un bateau pour la terre libre, un bateau qui pourrait bien repartir vide si les milices qui tiennent la ville refusent encore de délivrer les billets. Un homme en imperméable (Pascal Greggory), qui regarde depuis un quai de gare la ville haute,