Avec Fados, l’Espagnol Carlos Saura ferme une trilogie documentaire consacrée aux folklores urbains. Le dispositif qui a servi à Flamenco (1995) et à Tango (1998) est reconduit : les artistes sont filmés en studio, sans décor ou presque, dans des atmosphères travaillées par les éclairages. Le film se passe de fil narratif pour offrir une mosaïque illustrant la diversité du genre musical et ses liens avec son berceau, Lisbonne.
Première différence (et première déception) par rapport aux volets précédents : si le flamenco et le tango possèdent une forte composante chorégraphique, le fado ne se danse pas. Le parti pris d’illustrer la musique par des créations actuelles ne convainc pas : on est plus près de l’esthétique du show télé que du ballet contemporain. Heureusement, Carlos Saura (né en 1932) a appris à filmer en cinquante ans de carrière et les gros plans sur les visages, les doigts qui glissent sur le manche ouvragé des guitares portugaises, sont plus que de belles images. La musique elle aussi est à la hauteur, qu’il s’agisse du fado traditionnel (merveilleux Camané, bouleversante Argentina Santos) ou des tentatives de fusion avec le flamenco (duo intense de Mariza et Miguel Poveda), la ranchera mexicaine (Lila Downs), le Brésil (Chico Buarque, Caetano Veloso) ou la morna cap-verdienne (Lura, belle à tomber). Reste qu’un tel projet a peu de chances d’intéresser au-delà du cercle des aficionados world. Le récit non didactique évite les lourdeurs