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Libération
Interview

«Tout cela fait partie de mon histoire»

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publié le 28 janvier 2009 à 6h51

Amat Escalante aura 30 ans dans un mois. Ceux qui ont déjà vu Sangre, son premier film sorti il y a trois ans, ou ceux qui découvriront Los Bastardos doivent sans doute se l'imaginer sous les traits d'un Mexicain volubile, tout en énergie, sinon violence. Un tueur potentiel déguisé en cinéaste. Il s'agit tout simplement du contraire : posé, doux, limite fragile, féminin. Et avec ça, une bouille de gosse. Un gosse qui essaye de bien se tenir sous le décor luxueux du salon de thé de l'hôtel Meurice. Ce n'en est que plus flippant : il y a du médecin légiste sous ce calme.

(…)

J'ai toujours en tête la phrase de Fuller : «Si le premier plan ne te donne pas une érection, alors le film ne vaut pas la peine d'être tourné.» Les premiers plans doivent toujours avoir, selon moi, une force particulière. Là, on y voit les deux hommes traverser un canal de béton. On les voit venir de très loin, pendant très longtemps. En filmant leur trajectoire, je voulais montrer le ciment, le concret de Los Angeles. D'où cette pesanteur, cette durée et cette impression, d'emblée, d'une situation impénétrable. Ce n'est que plus tard, au montage, que le parallèle entre le premier et le dernier plan m'a sauté aux yeux. On démarre sur un plan de ville, de béton, et on finit dans la terre, avec cet homme en train de faire une cueillette dans un petit canal d'irrigation.

Il y a deux films dans Los Bastardos. Le premier flirte avec le documentaire social, le second est une fiction qui bascule vite dans l’horreur pure…

En réalité, il y a deux images à partir de quoi j’ai travaillé. En premier lieu, je voulais voir ces hommes, des travailleur