C’est à Boulogne-sur-Mer, mais surtout dans un paysage de ruines et de névrose familiale ordinaire. L’actrice Aurélia Petit, déguisée en apprentie sociologue, nous guide au sein d’une dynastie de ferrailleurs fondée par Marie-Rose, personnage aussi obsédant qu’invisible. Matriarche, elle est supposée être hospitalisée au début du film. On est donc au seuil du royaume des morts.
Trognon. Il y a la lumière du nord qui fait envie, la mer, une mélancolie des origines (le film de vacances délavé qui ouvre Nord Paradis) et d'immenses espaces vides - entrepôts, terrains vagues -, où s'entasse l'archéologie future de notre présent : non seulement les pièces récupérées sur des voitures, mais le métal des cafetières électriques ou d'un matelas, de tout objet désossable. La casse Marie-Rose est une vanité baroque, c'est là qu'on trie passé et présent, mort et vivant.
A travers les interrogatoires auxquels Aurélia soumet chaque membre de la famille, on arrive assez vite au trognon de l’existence même. Tous travaillent pour Marie-Rose et les différentes filiales de ce Léviathan de fer-blanc. Mais par-delà les jalousies, les mésententes, histoires de gros sous et de piété filiale en lesquelles chacun se reconnaîtra, se découvre une humanité toute palpitante, avançant comme elle peut avec la mort en vue. Ainsi Roselyne, fille de Marie-Rose, qui garde le magasin de pièces détachées fondé par sa fille décédée et qui ne le fermera, dit-elle, qu’au décès de sa mère. Son