Le public ne le sait peut-être pas encore, mais Kiyoshi Kurosawa est un auteur démodé. Fini, ou pas loin de l'être. Le cinéaste japonais qui a le moins été en phase avec la mode qu'il a pu lui-même susciter : il y a dix ans, la critique le découvrait ici, et lui souffrait au Japon de n'être qu'un cinéaste tournant à la chaîne cinq ou six films par an, dans une économie dite du V cinema (le Z n'est pas très loin), un peu porno soft parfois parce que ça rapportait tout à coup plus.
Humiliation contenue. Des gens plus jeunes que lui de dix ou quinze ans (Aoyama, Suwa), qui tournaient leurs premiers films, le révéraient comme un maître, mais lui ne voyait pas en quoi un type qui se lève le matin pour aller tourner des films pour bouffer pouvait être un maître en quoi que ce soit, sinon en humiliation contenue. Le plaisir d'être célébré en Europe, il ne l'a pas savouré, il l'a vécu comme une imposture de plus. C'est ce que l'on découvre avec stupeur, dix ans après, dans le long entretien qu'il donne ce mois-ci aux Cahiers du cinéma. Après quoi, il s'est passé effectivement une décennie où il bénéficia de plus de moyens, fit des films écologiquement hantés, prophétiques, souvent très beaux (Cure, Charisma).
Variations insensées. Hélas, quand un grand festival comme Cannes daigna l'inviter à concourir avec le gratin, ce fut avec Jellyfish, qui était un film abracadabrant et quand même assez raté. Les gros festivals se sont donc empressés de