Il y a cette scène en plein air proprement extraordinaire au tout début de Still Walking : un homme, sa nouvelle épouse et le jeune fils de cette dernière montent les escaliers qui surplombent la ville de Yokohama. Les marches sont hautes, la femme est encombrée de paquets, mais l'homme ne l'aide pas. Et le plan dure ce que gravir des centaines de marches peut durer, avec une inscription nette du temps et de l'espace. Mais le sens à donner à cette chorégraphie cruelle est ambigu : ce type qui ne pense qu'à ses problèmes de boulot (son éditeur ne le rappelle pas) est-il un mari japonais saisi en plein délit de machisme, un monstre d'égoïsme ou un type qui ne pense même plus à aider sa copine à porter les paquets tellement le sac de nœuds qui étouffe sa vie est lourd à porter lui aussi ? Réponse : les trois à la fois. Les trois tour à tour. Tout Still Walking est là, dans sa démarche : tout à la fois et tour à tour. Et du coup injugeable. Pas de condamnation possible, Kore-Eda ne filmant les choses que pour qu'elles se chargent de toutes les pistes possibles.
Papillons.Faisons comme si nous étions un dimanche, un dimanche au Japon. Faisons comme si il y a quinze ans de cela, à la même date, on avait perdu un frère, un frère héroïque qui se serait noyé en voulant sauver un autre gamin de son âge. Faisons comme si ce dimanche à Yokohama était l'anniversaire compliqué de cette absence avec laquelle chacun doit se débattre et conjuguer. Faisons co