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Libération
Critique

Kore-Eda sous film plastique

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Silicone. Après «Still Walking», le Japonais invente une fable mélancolique à base de poupée gonflée.
(DR)
publié le 15 mai 2009 à 6h51
(mis à jour le 15 mai 2009 à 6h51)

Bien sûr, on pourrait passer la nuit à se répéter de bonnes vieilles citations de Rossellini : «Les choses sont là, pourquoi les manipuler ?» Mais quand la chose en question est une soyeuse poupée gonflable, posée nue dans votre lit, offerte, et si en plus, rajoutons-en une couche, vous êtes un salaryman (col blanc) quotidiennement humilié et exténué dans un Tokyo empestant la solitude industrielle, parions alors que les bonnes résolutions rosselliniennes ne tiendront pas dix secondes. La chose est là, et elle a plutôt été manipulée.

Valve. A force de jouer trois fois par nuit les ersatz de copine, la poupée gonflable, ce joli vampire du XXIe siècle ensilicone, inoffensive, muette et docile, a même fini par en tirer un truc. Une forme d'héritage, si on veut. Un cœur. Cadeau empoisonné : car maintenant elle va souffrir. Mais chut, elle ne le sait pas encore, elle est dans cette phase où tout l'amuse : son cœur bat, ses jambes marchent, ses émotions l'emportent et le monde commence à prendre sens. Bref, ça gaze. La journée, elle sort. Trouve un job de vendeuse dans un vidéo-club. Fait du shopping. Découvre et imite ceux dont elle se sent proche : une enfant qui joue à la poupée, la folle du quartier qui remercie tout le monde, un vieux poète abîmé («le monde a trahi la poésie», c'est effectivement pas impossible), une femme coquette que l'âge rattrape et qui porte des bas couture. En chacun, elle sait reconnaître une part d