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Libération
Critique

Palestine, le temps des restes

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Le réalisateur porte un regard drôle et désabusé sur son pays depuis 1948.
publié le 12 août 2009 à 6h51
(mis à jour le 12 août 2009 à 6h51)

Donc, le troisième film d’Elia Suleiman porte pour sous-titre «Chronique d’une présence-absence». De la part d’un cinéaste qui manie l’art de la concision, on peut y lire quelque chose comme un programme ; retourner en guise d’autoportrait ces mêmes mots qui servent à désigner sinon à banaliser un état de fait politique et un drame humain qui dure depuis 1948, tenter sur un contre-pied de pouvoir se dire, faire rejoindre une nation (absente), une terre (perdue), une famille (la sienne) et un art (le sien).

La situation de Suleiman est étrange en elle-même. Il est, depuis Chronique d'une disparition, son premier film en 1996 et après le succès d'Intervention divine il y a sept ans, le représentant total du cinéma palestinien. Pourtant, pas une seconde son cinéma ne porte le poids de l'étendard. Pas une fois il n'est pris en flagrant délit de didactisme. Cela semble facile à dire comme cela, qu'il existe en Palestine un très grand cinéaste qui raconte son pays en faisant seulement comme si Jacques Tati était son principal interlocuteur (de fait, ils parlent la même langue : celle des grands aphasiques).

Parce que la mort est passée par là (celle du père, et puis celle de la mère), ce film-là n'a pas le même ton qu'Intervention divine. On s'accordera à le trouver plus sombre, et sans doute plus profond. Ce film-là a la forme d'un regard, d'un regard de très longue portée : un œil posé sur le passé (1948-1970 : la Palestine en exil d'elle-même), l'autre