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portrait

James Frey. Le jeu de la vérité

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L’auteur américain, 40 ans, revient sur la haine dont il fut victime après un roman perçu comme des mémoires. Une histoire de mensonge, et donc de littérature.
publié le 4 septembre 2009 à 0h00

Quel crime avait commis James Frey pour devenir l'homme le plus détesté des Etats-Unis, contraint à l'exil et au silence ? Avait-il volé comme Jesse James ? Tué comme Charles Manson ? Non. Au pays de la Vérité, il a fait bien pire. Mentir. Aurait-il braqué des banques ou massacré des femmes enceintes qu'on l'eut transformé en héros, parie-t-on, à l'instar des deux autres. Mais ce grand type barbu, qui combat sa méfiance par une désarmante douceur, a eu le malheur de décevoir des tas de gens. Et ce qu'ils tiennent de plus précieux au monde : leurs bons sentiments. Ce soir d'été zébré d'éclairs et arrosé de sodas, James Frey défend à Paris son troisième roman, L.A. Story, qui enfin recolle une vie en mille morceaux. Il y a six ans paraissait aux Etats-Unis A Million Little Pieces (Mille Morceaux pour la traduction française), brillante entrée en littérature qui racontait, sous une forme aussi affranchie que crue, épidermique, bouillonnante, la remontée des enfers (alcool, drogue), d'un personnage nommé Frey, James. Loué par les critiques et les drogués et les alcooliques et le public tout entier, Mille morceaux se vendait d'autant mieux que la maison d'édition le qualifiait, ce livre, de «mémoires». C'était en partie vrai ; le jeune auteur, 33 ans alors, avait suivi ce chemin de croix dans un centre de «rehab» du Minnesota. C'était en partie faux ; il avait écrit un roman, un ROMAN, s'autorisant toute la littérature dedans, des chos