Le journaliste n'envisage pas sans une certaine appréhension un entretien avec Michael Haneke, très austère de réputation. Va-t-on se faire taper sur les doigts à grands coups de règle parce que l'on pose des questions idiotes ? Un collègue a carrément fait un malaise dans la rue alors qu'il approchait de l'hôtel où avait lieu le rendez-vous. Or le cinéaste autrichien, parvenu à 67 ans au sommet de sa carrière, se montre détendu, ponctuant ses réponses d'un rire un peu ironique. Il n'a qu'une demande d'entrée de jeu : que la porte du salon soit fermée «car les portes ouvertes me rendent nerveux».
C’est votre premier film historique. Avez-vous travaillé de manière différente pour écrire le scénario ?
Je me documente rarement avant de me mettre à écrire. Je ne l'ai fait que deux fois : la première pour Code inconnu, parce qu'il y était question notamment des immigrés roumains et que je ne connaissais rien à leur vie, la seconde pour le Ruban blanc. J'ai lu des livres historiques sur le monde paysan d'avant la Première Guerre mondiale et énormément de traités de pédagogie allemands et français des XVIIIe et XIXe siècles. C'est très intéressant par ailleurs. Pour nous, quand on regarde le film, on a l'impression que les règles d'éducation sont cruelles, voire perverses, or c'était la manière normale d'élever les enfants autrefois. J'ai essayé de trouver une forme adéquate à ce que je raconte. Je ne supporte pas les films qui prétendent savoir comment était le passé : ils font, avec un faux naturalisme, une reproduction d'époque qui ne