Le jour, la nuit, le petit matin. Kinatay est construit sur ce cycle, à la fois rassurant et un peu désespérant, d'«une fin sans fin», comme le dit une chanson entendue au moment le plus nocturne du film. Recommencement qui nous concerne (c'est à nous que cette vie arrive) et sentiment d'impuissance partielle (elle peut continuer sans nous). Tout différent qu'il semble des autres films de Mendoza, Kinatay leur ressemble et les éclaire d'une lumière noire, parce qu'il joue, beaucoup plus violemment et à nu, d'un couple qu'on trouvait déjà dans Serbis ou le Masseur : celui du voyeurisme et de la dépossession.
Longue-vue. Il y a donc d'abord le jour. On retrouve la famille des acteurs de Mendoza dans une première partie qui s'amuse justement de la famille. Le poupin Coco Martin, ici nommé Peping, a pour petite amie la même actrice que dans Serbis. Elle était enceinte, elle a désormais accouché. Et aujourd'hui, ils se marient. On suit leur marche ou leur moto-taxi dans Manille à la longue-vue, à la fois collés aux corps des héros et à distance. Une digression les retarde en route : un homme veut se jeter du haut d'un panneau publicitaire. La télé filme sa mère, celle-ci crie dans le porte-voix que lui tend la police : «Tu nous fais honte, on va te voir à la télé, allez viens, on rentre.» Puis c'est la cérémonie, le repas expédié, et quelques tentatives de soutirer un peu d'argent au parrain fortuné, car l'