Après l’Enfer de Henri-Georges Clouzot, montage d’images d’un film jamais achevé, c’est au tour de Lettre à la prison d’émerger à la lumière. L’histoire de ce film jamais fini est cependant bien différente. Clouzot nageait comme un perdu dans son «budget illimité», le débutant Marc Scialom n’avait, lui, pas une thune. Juif italien né à Tunis en 1934, il a émigré en France après l’indépendance proclamée de l’ancien protectorat français en 1956. Fasciné par Godard (il verra A bout de souffle trois fois de suite), il intègre l’IDHEC mais ne poursuit pas le cursus jusqu’au bout. C’est alors qu’il se met en tête de réaliser un film avec les moyens du bord. Comme le scénario qu’il a écrit -l’histoire d’un jeune tunisien qui débarque à Marseille afin de venir en aide à son frère qui a été jeté en prison- ne trouve pas de producteur, il rassemble ses économies et se met à tourner dans les rues de Marseille et à Djerba avec des comédiens non-professionnels, en noir et blanc, parfois en couleur. Une fois qu’il se retrouve à la tête d’une matière cinématographique suffisamment dense, bien qu’incomplète par rapport à son désir de récit, il fait un premier montage qu’il montre à Chris Marker à qui il demande de lui apporter son aide. Mais Marker ne lui dira jamais rien après la projection et Marc Scialom apprendra par la bande que l’auteur de la Jetée à trouvé que le film en chantier n’était «pas assez politique». Nous sommes dans des années de militantisme hard, Godard va bientôt bascul
Critique
L’esprit de la «lettre» retrouvé
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par Didier Péron
publié le 2 décembre 2009 à 0h00
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