Pauvre Denzel Washington, les frères Hughes lui ont confié une double mission impossible : celle, intentionnelle, de sauver le dernier exemplaire de la Bible qu'il transporte «vers l'ouest» dans le Livre d'Eli, et celle, in fine, de sauver ce blockbuster évangéliste sans doute destiné aux nostalgiques de l'ère Bush (il y en a !). On est loin de sa belle prestation dans American Gangster, mais il s'extirpe malgré tout, grâce à son charisme naturel, du ridicule qui l'entoure : sa tenue (keffieh palestinien, veste militaire et lunettes de soleil genre pub pour long séjour en montagne), son acolyte (Mila Kunis) qui a l'air tout juste sortie d'un centre d'épilation de Beverly Hills, comme le remarque le New York Times, et sa panoplie d'armes hétéroclites (machette, hache, couteau, revolver et arc à flèches).
Fourbu. On nage de bout en bout dans les clichés et les fausses notes. Un détail, pour l'exemple : KFC et Motorola sont là, bien en évidence, au beau milieu d'un paysage futur détruit par l'Apocalypse, sillonné par des barbares assoiffés de sang. Les frères Hughes, découverts au début des années 90 avec le film de ghetto Menace II Society, réenfourchent le cheval fourbu de la fin du monde. Après la Route et 2012, avant Daybreakers et Legion (qui sortent en mars), le Livre d'Eli nous enfonce dans cette série de films gris qui fictionnalise la peur américaine de l'anéantiss