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Libération
Critique

Basque «ander» ground

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Paysans. En Biscaye, une intrigue passionnelle, agricole et entre hommes.
(Bodega Films)
publié le 17 février 2010 à 0h00

L'action de Ander se situe au crépuscule des années 90 où, millénarisme en tête, il fut beaucoup question d'un bug qui, le 1er janvier 2000, allait causer une apocalypse informatique. Au fil du film, l'évocation de cette «grande peur» est suffisamment récurrente pour qu'on puisse s'interroger sur son statut et sa nécessité : aparté, digression obsessionnelle, hors sujet ? Imaginons plutôt qu'elle est comme une didascalie théâtrale appliquée au cinéma. Non pas tant une injonction du metteur en scène pour cadrer le jeu de ses acteurs, qu'une note philosophique en bas d'écran, une scolie qui rappelle que la durée d'une vie n'est pas réductible à son temps compté.

Pour Ander, un paysan qui vit avec sa sœur et sa vieille mère dans une ferme paumée de la Biscaye (Pays basque espagnol), le temps passe (40 ans, déjà) et s'éternise, comme minéralisé par les coutumes domestiques (lever, petit-déjeuner, pacage, traite des vaches, dîner, extinction). Le film excelle quand ses plans contemplatifs fixent cette sorte d'inaction extatique où l'immobilité du présent et son abîme sont faits d'un sourd appel du passé à l'avenir. De même quand l'image flâne au pré en compagnie du bouvier, comme pour un inédit poétique téléporté du début des Bucoliques : «Allongé sous le vaste feuillage du hêtre, tu essayes, Tityre, un air champêtre sur tes légers pipeaux…»

Certes, Ander n'est pas le pâtre de Virgile, mais un travailleur d'aujourd'hui contrai