Après Je m'appelle Sabine, le documentaire qu'elle a consacré à sa sœur autiste et son long chemin de croix psychiatrique (Libération du 29 janvier 2008), Sandrine Bonnaire poursuit un travail autobiographique fascinant dans un livre intitulé Le soleil me trace la route. Il s'agit d'entretiens approfondis réalisés par les journalistes et scénaristes Tiffy Morgue et Jean-Yves Gaillac, qu'elle connaît de longue date. La plupart du temps, ce genre d'entreprise mêlant souvenirs intimes et anecdotes professionnelles s'exerce sous le contrôle sourcilleux de spécialistes de la communication et d'agents artistiques qui veillent à tout neutraliser pour que la star ait à la fois l'air parfaitement insipide et profondément mystérieux. Ce n'est pas le style Bonnaire, qui a toujours tracé sa route à sa façon, et on retrouve ici son intelligence et un naturel pour le moins inhabituel à ce niveau de carrière (vingt-sept ans de cinéma au compteur alors qu'elle n'a que 42 ans).
Le livre commence par l'enfance dans une HLM à Grigny (Essonne) au sein d'une famille prolétaire de onze enfants. Son père, ouvrier-ajusteur, est un homme plutôt effacé. Sa mère, plus fantasque et qui ne travaillera jamais longtemps, appartient aux Témoins de Jéhovah et mène une double vie (prenant un amant qu'elle ne cache à personne) : «Je repense aussi à cette période avant Grigny où mon père a perdu son emploi, on s'est retrouvé dans une espèce de chalet sans eau ni électricité dans l