Julie Delpy n'a peur de rien. Elle aurait pu capitaliser sur le succès de Deux Jours à Paris en déclinant un film léger, capteur de l'air du temps. Elle revient avec un film en costumes dans la Hongrie du XVIIe siècle. On ne connaît terrain plus boueux. Combien de cinéastes chevronnés a-t-on vu se vautrer sur des projets similaires, leur envie paralysée devant la lourdeur de la reconstitution historique. Pas elle. C'est même étrange : non seulement cette posture historique ne semble pas peser sur son geste, mais on avance lentement dans son film, avec le sentiment de plus en plus fort que Delpy s'est emparée de cette histoire de comtesse vampire, sadienne, Barbe-Bleue au féminin, pour jeter sur notre époque un autre regard, se servant du passé comme révélateur.
Cercles. Qu'est-ce qui nous concerne, qu'est-ce qui la concerne, dans la sorcière Erzsébet Bathory ? Tout un tas de choses d'actualité : la place des femmes dans les cercles du pouvoir, la terreur frénétique de ne plus être aimée au fur et à mesure qu'avance l'âge. Erzsébet Bathory a 40 ans lorsque son mari meurt en revenant d'un combat contre les Turcs. Elle hérite de son pouvoir, l'étend. A partir de quoi elle commence par gêner.
Au même moment, elle succombe au charme d’un homme de 20 ans (Claire Chazal n’a donc pas inventé le concept cougar). Sa passion confine à la folie pure, elle imagine des rivales partout, plus jeunes qu’elle. Les rumeurs lui font perdre la tête. Chaque jour