Cruel malentendu. Les partisans d’une justice implacable pensent que l’affaire Polanski est montée en sauce, qu’on crie à l’iniquité parce qu’elle touche un metteur en scène connu, alors que les juges ne font que leur métier en appliquant la loi. Ils rappellent, l’index levé, que les crimes, seraient-ils anciens, seraient-ils commis par des «people», méritent châtiment. Ceux-là doivent lire la lettre de Roman Polanski que nous publions aujourd’hui. Ils y vérifieront, comme nous l’avons déjà écrit plusieurs fois, qu’un mécanisme rigoureusement inverse est à l’œuvre. Voilà un crime vieux de plus de trente ans pour lequel la victime ne réclame plus punition depuis longtemps, qui était tombé dans l’oubli d’une prescription de fait et dont l’auteur était invité en hôte d’honneur par tout ce que l’Europe compte d’autorités culturelles ou politiques. Voilà un crime pour lequel la justice américaine avait passé un accord, comme elle le fait souvent, accord qu’elle a brusquement dénoncé pour des motifs troubles, causant ainsi la fuite en Europe de Roman Polanski. Voilà un crime qu’on exhume pour des raisons où, de toute évidence, la loi est un prétexte et la célébrité de Polanski, qui rejaillit sur le juge, la vraie raison de son acharnement. Roman Polanski a déjà payé pour son acte, par la prison et par l’exil. Son seul crime, aujourd’hui, c’est la gloire qu’il a acquise par une œuvre cinématographique mondialement respectée et qui en fait un gibier de magistrat en campagne électora
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