C’est ce qu’on appelle un message fort. Frédéric Boyer, le nouveau délégué de la Quinzaine, a sélectionné deux films sud-américains de genre, l’un et l’autre tournés avec des moyens dérisoires et, coïncidence sur le gâteau, par des réalisateurs de 37 ans qui signent là leur premier long métrage.
Ingestion. Le Mexicain Somos Lo Que Hay de Jorge Michel Grau convoque un thème tombé en désuétude depuis les turpitudes de l'indépassable Ruggero Deodato dans les années 80 : le film cannibale. Sauf qu'au lieu d'offrir des filles bien roulées et à poil au solide appétit d'une tribu oubliée d'Amazonie, Grau imagine une société mexicaine qui aurait franchi le dernier palier de la décomposition sociale en conduisant les plus paumés à boulotter leurs contemporains pour survivre. La sombre affaire se présente sous la forme d'une famille de reclus s'adonnant à une religion aussi bricolée que leur appartement de misère, impliquant le sacrifice d'êtres humains et, donc, leur ingestion.
Après la disparition du père, c'est au tour du fils aîné de trouver de quoi manger pour sa mère, épuisée par l'injustice et dans un état de fureur permanente, son frère porté sur la castagne, et sa jeune sœur prête à tout pour survivre. Pour accomplir le rite, il faut choisir la bonne proie : gamin des rues ou chauffeur de taxi, par exemple, mais ni une pute ni un gigolo : «Moi, manger du pédé, jamais !» dit le jeune frère qui a des principes. Sans jamais esquiver les moments d