Les deux jeunes héroïnes du dernier film de Jean-Paul Civeyrac ressemblent à beaucoup de ces adolescentes que l’on peut croiser dans les rues de Paris, de ses banlieues et de partout ailleurs. Un peu gothiques et ténébreuses, le regard bas, sombrement vêtues et munies de quelques laisser-passer générationnels : un piercing, du vernis noir, peut-être un tatouage. Mais rien d’extravagant, de trop coupant : une discrétion de feu follet les caractérise aussi.
Noémie et Priscilla sont ces Filles en noir, en surface vestimentaire comme en profondeur mélancolique, victimes du blues violent qui frappe souvent leur âge et qu'elles convertissent parfois en pessimisme absolu, en insurrection morbide et suicidaire, se convainquant si tôt qu'il n'y aura rien de bon à vivre. Ces deux-là, lycéennes, ont vu leurs solitudes s'aimanter, un peu par mimétisme, par fascination gémellaire et réciproque, mais aussi par un réflexe qui est un acte manqué de survie : chacune voit confusément en l'autre le radeau qui va conjurer le naufrage, au risque d'être le lest qui va la faire couler…
Avec Des filles en noir, Civeyrac donne son étude personnelle d'un thème cinéphile patrimonial, de Bresson, (le Diable probablement) à Sofia Coppola (Virgin suicides). On sait depuis Ni d'Eve ni d'Adam, son premier film, qu'il admire le premier, dont on vérifie ici aussi l'empreinte, mais Des filles en noir peut également s'entendre comme un écho français, arte pov