Des lampes installées dans un couloir, l’embrasure d’une porte, le salon d’un hôtel ou sur la plage, et quelques minutes seulement pour attraper un regard, un sourire juste avant qu’il ne se dessine, un relâchement, quelque chose de singulier. Pendant douze jours, rencontrer des acteurs, des actrices et des metteurs en scène fut un drôle de sport, aussi frustrant qu’excitant, que l’on pratiqua au sprint sur la Croisette.
Il y a les publicists (les «assistants des stars américaines») qui disent «non» pour commencer, et souvent «non» après ; les attachés de presse français de chaque film, qui tentent de rallier les publicists à votre cause, pour vous expliquer qu'hélas Cate Blanchett et Russell Crowe ne feront que des télévisions, que Naomi Watts est à Cannes avec ses deux enfants et la promotion mondiale de ses deux films à assurer, et que demander à la voir vingt minutes, mais vous n'y pensez pas ! (le one on one, la «rencontre face à face», avec interview et photographie, est de plus en plus rarement accordée).
A l'écart de ces machineries pénibles, combien ont joué le jeu, et c'était épatant que de se retrouver en face d'hyperactrices, les Huppert, Binoche ; d'en croiser d'autres pour lesquelles on a fondu (Haley Bennett, parfaite en lesbienne atomique du Kaboom d'Araki, ou Lucy Punch, l'allumeuse futée du Woody Allen) ; d'en découvrir quelques-unes d'une fraîcheur emballante (Ana Girardot) ; d'en voir enfin qu'on adorait depuis longtemps