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Libération
Portrait

Tilda Swinton, drôle d’oiseau

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Ses choix de cinéma sont épatants, depuis ses débuts avec le provocateur Derek Jarman jusqu’à son brillant nouveau film Amore. Rencontre avec une fille « arty » mais pas vraiment « fille », qui croise ses propres fantômes et ne rêve que d’aventure.
Tilda Swinton pour Next (Jean-Baptiste Mondino pour Next)
publié le 4 septembre 2010 à 13h25

Après avoir joué des hommes, des femmes/hommes, des sorcières, des femmes perdues, des mères ravagées par le chagrin, des folles sur la plage, Tilda Swinton interprète dans Amore de Luca Guadagnino une héroïne emballée par la passion, par la découverte de ce qu'est le sexe, l'amour, lorsqu'on se croit une épouse respectable, une mère presque fanée. Passé le défi prosaïque des dialogues en italien, langue qu'elle ne parlait pas du tout, et en russe, idem, voilà un rôle qui fait l'effet d'une explosion de dentelles couleur chair.

Autour d'elle, face à la mondialisation des capitaux et des corps, un univers nécrosé, ployant sous les splendeurs passées, vacille, celui de la haute bourgeoisie milanaise ayant fait fortune dans la mode (Silvia Fendi est co-productrice du film). Cet Amore pratique une révolution souple, tendre, éclairée d'une lumière tantôt glacée tantôt aveuglante, et sous cette lumière Swinton est tour à tour effacée, nue, jouisseuse, humiliée, révélée à elle-même.
« Tous les rôles que j'ai interprété sont des jeux, des chapeaux que j'ai mis au gré des projets. Je n'ai pas besoin du cinéma pour découvrir qui je suis, je pense me connaître fort bien. »


Tilda Swinton se précipite dans l'avenir comme si elle se bousculait elle-même au portillon, comme le font les gens brillants qui savent que rien ne reste à la fin, que les films pourraient disparaître, peu importe, seul flotterait