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Libération
Disparition

Claude Chabrol, le féroce tranquille

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L’itinéraire de ce fils de pharmacien, anticlérical et casseur de bourgeois, l’a conduit de la Nouvelle Vague aux succès consensuels.
Claude Chabrol devant une image d'Isabelle Huppert, au festival de San Sebastian, en septembre 2003. (REUTERS)
publié le 13 septembre 2010 à 0h00
(mis à jour le 15 septembre 2010 à 1h22)

«Le 24 juin 1930. La date la plus importante de mon existence, à 10 heures du soir. Tout le monde pensait que j’étais mort dans le ventre de ma mère. Quatre mois avant, mes parents avaient pris un bain ensemble, le chauffe-eau avait explosé, on les avait emmenés à l’hôpital de la rue Broca où le médecin leur avait dit : « Comptez pas sur le gosse. » Ma naissance est une date capitale pour moi et pour la science. Je sens toujours très bien et très vite le gaz.» Chabrol a donc failli mourir asphyxié in utero. On peut difficilement imaginer meilleur début anxiogène pour une vie de boulimique : grand mangeur, bon buveur, gros filmeur - 70 films, du Beau Serge (1958) à Bellamy (2009), à raison de deux ou trois par an les périodes fastes. Il faut savamment trier les serviettes et les torchons, les perles et les navets. Chabrol a joué la carte de la rapidité d’exécution pour ne pas avoir trop à se poser la question d’une signature imparable. Ce qui reste, c’est la rage et l’humour. Une certaine vanité aussi, quand il déclarait que dans la course à l’échalote avec ses deux amis et concurrents de la Nouvelle Vague, Truffaut et Godard, il serait gagnant car «ni mort, ni suisse». Sur ce point, il s’est trompé, il n’est toujours pas suisse, mais Godard est vivant.

«Un film c'est comme un train. Il y a toujours un moment sur le trajet où il aurait pu être bon. Le ratage, c'est quand on ne descend pas à la bonne station. En général, c'est parce qu'u