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Libération
Portrait

Iosseliani, l’URSS mal léché

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Tradition familiale oblige, le réalisateur n’a jamais cédé aux interdits soviétiques.
publié le 22 septembre 2010 à 0h00

Quand on lui demande de définir Chantrapas, son dernier film, Otar Iosseliani répond (in dossier de presse) : «C'est une parabole sur la nécessité de rester soi-même malgré tous les obstacles qui nous entourent. Ce qui, a priori, est condamné au fiasco. Voilà ce que je voudrais partager avec le spectateur : le bonheur d'être une pierre, de résister à tout.» Ce mode d'emploi du film vaut pour la vie de son réalisateur. Une pierre, en effet, qui a enduré bien des chocs et des chaos, mais a aussi beaucoup et bien roulé. Son grand et cher sujet, auquel il revient sans cesse même quand il feint de s'en éloigner, c'est la Géorgie, son pays, «qui survit, malgré tout».

Il était une fois un merle chanteur, né à Tbilissi le 2 février 1934, et que rien ne prédestinait au cinéma. Dans sa famille de petite bourgeoisie, où le père est ingénieur des Ponts et Chaussées, les études se devaient d'être sérieuses, c'est-à-dire scientifiques. De 1953 à 1954, le jeune Iosseliani suit donc des cours de mathématiques à l'université de Moscou. Mais dans la capitale de l'empire soviétique, il découvre aussi quelques beaux restes de l'âge d'or du cinéma bolchevique : Dovjenko et les films de Boris Barnet - «surtout Au bord de la mer Bleue». Mais aussi des films de Fellini, d'Abel Gance, de René Clair. «Tout cela était visible au Fonds du cinéma d'Etat, dans une petite ville à 100 kilomètres de Moscou. Il fallait prendre le train, c'était long, m