C'est une histoire de place, la place d'un homme. Adam, 55 ans, ex-champion de natation devenu le premier maître nageur du Tchad, surveille désormais la piscine d'un hôtel pour touristes à N'Djamena, où travaille aussi son fils Abdel. Dans leur tenue de travail immaculée, ils forment une paire heureuse de men in white. Mais, un jour, la direction chinoise de l'établissement décide de faire d'Adam le planton du parking, et le remplace auprès des clients par ce fils. Adam en est malade. «La piscine, c'est ma vie», dit-il bêtement, ou tragiquement.
Mélancolie. La dépression d'Adam est climatique : tout s'assombrit, le vent se lève, la poussière poudroie, et les rumeurs de la guerre grondent au large de la capitale. Dans ce pays qui n'a pas connu de véritable paix, ou apaisement, depuis des décennies, on manque aussi d'argent et de soldats. Si Adam ne peut pas payer son tribut à l'armée, c'est son fils qu'il devra lui livrer. Placé, remplacé, déplacé. Quelle place reste-t-il à Adam, qui a vu toutes ses illusions modestes de réussite relative et de tranquillité lui glisser entre les doigts, comme les reflets liquides de cette piscine aux alouettes, qui viennent régulièrement noyer l'écran d'Un homme qui crie de leur mélancolie impressionniste ?
Le jour où Abdel est enrôlé de force sous ses yeux embusqués, Adam ne bouge pas. Crime, vengeance, lâcheté ? Il ne faut pas compter sur Mahamat-Saleh Haroun pour prononcer un réquisitoire, ou même