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Interview

«Je pleure, je ris, je vis, ça bouillonne»

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Le réalisateur mexicain Alejandro González Inárritu (Amours chiennes, Babel) refait la génèse de Biutiful.
publié le 20 octobre 2010 à 0h00

Alejandro González Inárritu a gardé de ses années de DJ radio le timbre puissant et la teneur rock du propos. Même dans les salons feutrés d'un bel hôtel du VIIIe arrondissement parisien, le Mexicain se tient face à vous comme une rock star.

Tout en noir, charismatique, se souciant peu de la mesure. Semblable à son cinéma : excessif.

Pourquoi avez-vous décidé de filmer Biutiful dans le quartier de Santa Coloma, en banlieue de Barcelone ?

J’avais ce personnage en tête depuis des mois, avec pour seule certitude qu’il serait joué par Javier Bardem, car il trimbale avec lui le même type de contradiction qui fonde mon personnage. Je le connais depuis dix ans, on s’est rencontré à Los Angeles dans la «party des losers», la fête réservée à ceux qui n’ont pas gagné l’oscar. Je savais aussi que je tournerais ce film en langue espagnole, et les faubourgs de Barcelone me semblent être particulièrement signifiants en terme d’immigration.

Barcelone n’est pourtant pas le premier lieu auquel on songe lorsqu’on parle des problèmes liés à la mondialisation ?

Mon film n’est pas seulement à propos de l’immigration clandestine. Ce voisinage est juste un contexte. Et si le Mexique ou les Philippines peuvent être tout aussi intrigants sur cette question, Barcelone éclaire bien ce qui se passe en Europe depuis quinze ans, où l’immigration est en train de changer les choses en profondeur, du point de vue social comme économique. L’Europe va devoir intégrer cette immigration, car elle ne s’arrêtera pas. Or, cette intégration est plus lente qu’en Amérique, par exemple. En Espagne, à ce que j’en ai vu, les immigrés clandestins ne parlent pas espagnol, encore moins catalans et les Espagnols ne veulent pas les inté