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Libération
Critique

Svankmajer, haut déviant

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Hommage . L’œuvre intégrale du surréaliste tchèque est présentée en sa présence au Forum des images.
publié le 27 octobre 2010 à 0h00

En 1983, le public du festival d'animation d'Annecy découvre médusé Possibilités du dialogue, qui rafle le grand prix. Un film virtuose, féroce, d'une inventivité débridée, sur les difficiles échanges humains et leurs impasses, où des têtes belliqueuses, assemblage de fruits et légumes, outils, livres façon Arcimboldo, s'entre-dévorent et se régurgitent avec fracas, digérées jusqu'à ne former plus qu'un compost uniforme. Le film remporte l'Ours d'or à Berlin la même année, puis, en 1990, Annecy le déclare meilleur film des trente ans du festival. Son auteur, le tchèque Jan Svankmajer, est inconnu en dépit d'une filmographie conséquente, mais cantonnée aux frontières peu poreuses de son pays, que ses courts métrages sarcastiques dérangent (il est interdit de filmer de 1973 à 1979).

Déviants. Le monde occidental découvre alors une œuvre singulière, exubérante, obsessionnelle, que le Forum des images met à l'honneur jusqu'à dimanche, présentant pour la première fois en France, et en présence du réalisateur, l'intégrale des films de 1964 à 2010, soit vingt-six courts métrages et six longs métrages, dont le dernier, Survivre à sa vie, a été présenté en avant-première hier. L'ombre de Svankmajer, l'un des derniers surréalistes, plane aujourd'hui sur nombre de réalisations, des frères Quay à Tim Burton, contaminés par son ton caustique et son esthétique sale et démembrée, voire à Cronenberg pour ses accouplements entre matières inerte et organique.