«Oh la tristesse ! Déjà les mecs sont pas aidés côté dotation de cerveau, mais si en plus ils picolent là-dessus», lance un gardien de la paix d'Elbeuf (Seine-Maritime) qui découvre un jeune homme ivre allongé sur un trottoir au pied d'une poubelle. Ainsi, les scènes du quotidien des 150 policiers du commissariat face à des personnes cabossées par l'alcool et la solitude s'enchaînent sans fard ni floutage sous la caméra de Virgil Vernier et Ilan Klipper. Rarissime au cinéma, Commissariat n'a rien du L627 de Bertrand Tavernier sur les flics parisiens en planque dans les sous-marins pour arrêter en flag les dealers. Ces deux jeunes réalisateurs restituent la vérité crue de policiers qui se coltinent toute la misère du monde, les gens «en manque d'amour» qui dévissent.
«Dégénérés». Ils avaient commencé par tourner les flics en herbe à l'école des gardiens de la paix de Rouen. Le ministère de l'Intérieur les a autorisés à suivre des stagiaires en poste à Elbeuf, à côté de Rouen. Une ancienne ville de relégation, où les ex-bagnards, interdits de séjour dans les grandes villes de la région, trouvaient refuge. La légende colportée par des policiers veut que les forçats sortis du bagne se soient reproduits entre eux, créant «une ville de dégénérés». Pourtant, Elbeuf apparaît pauvre et désœuvrée «comme tant d'autres» aux yeux de Klipper et Vernier, qui ont passé trois mois au commissariat. Ils ont capté des scènes