On se demande comment Darren Aronofsky vit avec ça, mais le succès critique, il y a deux ans, de son précédent opus The Wrestler (featuring un catcheur nommé Mickey Rourke) s'était accompagné de l'idée selon laquelle la réussite du film venait du fait que, pour une fois, le jeune cinéaste de Brooklyn se tenait à distance de lui-même. Se méfiait de son propre penchant à laisser la machine s'emballer jusqu'au grand n'importe quoi. Certes, Pi et Requiem for a Dream, ses premiers opus forgés dans un style brutal et lyrique, flirtaient déjà souvent avec la grandiloquence, mais l'époque (la fin des années 90) tenait encore ce trait pour de l'audace.
Divan. Jusqu'à The Fountain (en 2006), son film d'anticipation avec Hugh Jackman, catastrophe esthétique où chaque scène galopait dans le ridicule. Le public était soudain mis en face d'un cas rarissime de cinéaste ne pouvant plus se faire confiance. Un type talentueux mais à qui il était déconseillé de se lâcher. Qu'Aronofsky représente une menace pour lui-même, il en a conscience puisqu'il en fait le sujet de Black Swan, un projet qu'il traîne dans ses cartons depuis dix ans.
On a toujours tendance à deviner sous la caméra d'Aronofsky un documentaire sur ses acteurs, quand en sous-texte il ne parle en fait que de lui. Il était déjà facile de deviner le cinéaste battu sous les traits de Rourke, catcheur à terre remontant la pente huilée jusqu'à la victoire. Il faudra