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Critique

«Restless» : plus vive que moi, tumeur

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Les critiques du Festival de Cannes 2011dossier
Gus Van Sant filme un mélo sans affects parmi une jeunesse fantôme et dévitalisée.
publié le 13 mai 2011 à 0h00
(mis à jour le 13 mai 2011 à 9h13)

Il faut se méfier des conventions, surtout lorsqu'on les fabrique nous-mêmes. La perception européenne, et particulièrement française, de Gus Van Sant est une de ces fabrications conventionnelles et à demi-conscientes. Il nous plaît, ou nous rassure, de se figurer le cinéaste de Portland comme un artiste un peu marginal, décalé par rapport au système et focalisé sur quelques marottes qu'il maîtrise fort bien : l'adolescence, la musique, la narration des mélancolies modernes… Pourtant, il existe aussi un autre Van Sant, et même plusieurs, comme sa filmographie n'a cessé de le démontrer. L'écart de style, de genre et de registre entre Prête à tout (1995) et Gerry (2002), l'antagonisme vertigineux entre Even Cowgirls… (1993) et A la recherche de Forrester (2000), donne l'amplitude assez exceptionnelle de la capacité d'adaptation et du goût de l'aventure de Van Sant, sans parler de son upgrade du Psychose de Hitchcock, cas limite et absolument unique dans l'histoire du cinéma.

Sécheresse. Mais, même en sachant tout cela et même si l'on apprécie Gus Van Sant autant pour sa constance que pour ses revirements, son dernier film, Restless, qui ouvrait hier Un certain regard, reste un objet particulièrement déstabilisant. Sa surface, pourtant, ressemble à un monde connu des amateurs du cinéaste. Annabel, jeune et belle femme en phase terminale d'une tumeur au cerveau, rencontre Enoch, jeune et bel homme morbide qui