En février, Une séparation d'Asghar Farhadi, né à Ispahan en 1972, raflait l'ours d'or. Une récompense entourée d'un certain scepticisme critique. De qualité faible, Berlin 2011 avait surtout été marqué par des prises de positions contre la mise en résidence surveillée et l'interdiction d'exercer qui avait frappé, en décembre, deux autres cinéastes iraniens : Jafar Panahi et Mohammad Rasoulof. Le jury avait-il marqué de son soutien ces deux Iraniens prisonniers en décernant le prix suprême à un autre Iranien : l'idée est tordue, mais chacun y a quand même pensé.
Découvrir Une séparation quatre mois plus tard permet de revenir au film même. Et la première surprise tient à sa force plastique : totalement à l'opposé du style pompier qui permit à tout un tas de descendants de Makhmalbaf de rafler des prix à la pelle, c'est là un film nerveux, presque animal, porté par une caméra qui ne tient pas en place mais qui, partout où elle se positionne, trouve le bon angle, la bonne vitesse, la bonne distance. Farhadi sait jouer avec une palette de couleurs assez réduite, du bleu marine au vert fané, une façon de peindre son monde en sombre en se servant des tons du quotidien. Un bon antidote au cliché du style iranien : Farhadi est un très bel antisymboliste, mais c'est aussi un antinaturaliste. Il est le type même du cinéaste qui arrive aux confins de deux générations et se sert de son envie de cinéma comme bon lui semble.
On a pu lire qu'il ne s'étonne plus quand on lu