Cher Paulo Branco, Nous avons à la fois vu le même film et nous en avons tiré des enseignements très différents. Oui Fernand Melgar descend dans l'enfer aux côtés des gardiens, avec comme une majorité du public, une sorte d'a priori en faveur de ces gardiens qui semblent si humains. Trop humains, dirait l'autre. Vous parlez à leur propos avec justesse de «sympathie désincarnée» mais c'est bien ce que le réalisateur a montré et ce que le spectateur ressent… D'abord la caméra reste auprès des enfermés, des promis à l'expulsion, plus longtemps qu'auprès des puissances invitantes. Ensuite, les oreilles de l'équipe, leurs micros, écoutent leurs sentiments, qui deviennent vite des revendications et des conceptions du monde, avec plus d'attention. Très vite, le discours des premiers personnages, les employés «humanistes», comme vous les appelez (et comme je les qualifierais également avec guillemets) paraît stéréotypé, vide de sens, et ceci quoi qu'ils en pensent, alors que celui des seconds, les condamnés au départ forcé, au vol spécial, prend une singularité et une profondeur convaincantes. A la fin, il est difficile de ne pas être bouleversé par leur sort, comme de ne pas être révolté par la dernière séquence pendant laquelle, après la mort d'un de ces proscrits, l'un des gardiens les «plus à l'écoute» reprend sa besogne comme si rien ne s'était passé.
Fernand Melgar n’a pas embouché une trompette pour clamer sa douleur ou pour se situer. Il est le représentant