Situation si classique qu'on pourrait la décrire les yeux fermés. L'acteur, soudain plus verrouillé que l'huître : «Je préférerais qu'on en revienne au film, vos questions sont trop personnelles… Ah, non, je ne vous dirai pas pour qui je vote, de toute façon, la politique, c'est pas mon truc.» Bon, va pour le film, en priant pour que l'interview pliée, les doigts filent sur le clavier comme animés par une obscure flamme intérieure… Hemingway, entre dans mon corps ! Au lieu de quoi : Pascal Elbé.
Dans R.I.F., polar à sombre héros flic-pile électrique (Yvan Attal), Elbé est un gendarme de province, humaniste sous l'uniforme de rigueur. Du genre à comprendre les douleurs des autres, à deviner les failles, tout ça… Tout ça avec la joue creuse, le regard las de celui qui en a trop vu, le verbe et le sourire rares, les amateurs de stéréotypes apprécieront. Les amateurs d'Elbé salueront pour leur part l'économie de moyens, une fois de plus. Elbé, aussi téléphoné soit le rôle, joue sobre et juste, comme d'hab. De la comédie sentimentale (Mes amis, mes amours, Comme les autres, Quelque chose à te dire…) au drame (le Dernier Gang, Tête de Turc), une constance mate, mâchoires serrées. Ténébreux old school à voix grave, Elbé, en descendance de Ventura quand il aurait ses chances dans le registre latin flamboyant, cheveu jais, iris noisette, sourire Ultrabrite. Postulat : ce type, qui avance brique par brique, cassera la baraque un jour pas trè