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Libération

Une énigme sortie des abîmes du temps

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La découverte de ce sanctuaire vieux de 36 000 ans, en 1994, a balayé l’histoire de l’art pariétal et nombre de certitudes.
La grotte des rêves perdus.
publié le 31 août 2011 à 0h00

Lorsqu’en décembre 1994 la grotte Chauvet sort de son obscurité pour entrer en science, les préhistoriens ne savent pas encore que le choc du savoir sera au niveau du choc esthétique. L’exploitation scientifique en cours, sans équivalent par sa méticulosité et la protection rigoureuse du site, a rudement secoué leurs méninges.

Le choc fut d’abord celui du calendrier, avec les datations au carbone 14, réalisées à partir de charbon de bois provenant des peintures, mais aussi de traces de torches, de feux d’éclairage et de foyers où les peintres fabriquaient leurs pigments picturaux. Le premier verdict en laissa plus d’un pantois. Avec 36 000 ans au compteur pour les plus anciennes traces (32 000 ans en datation «non corrigée»), la grotte Chauvet se hissait directement au rang de grand-mère des grottes ornées.

Sophistication. Lascaux, Niaux ou Altamira (en Espagne) sont vieilles de 17 000 à 12 000 ans. La durée qui les sépare ridiculise toute l'histoire connue depuis les pharaons.

L’ancienneté de la grotte Chauvet réduisait à néant trente années de reconstitution d’une chronologie stylistique des grottes ornées. Tout s’écroulait sous la chronologie implacablement dressée par les atomes radioactifs.

La construction d’une «histoire de l’art» qui serait partie du simple pour arriver au complexe ne tenait plus. Sur les parois de la grotte ardéchoise, estompes et perspectives, précisions naturalistes et forces des symboles, compositions d’ensemble et détails esthétiques