Manifestement, les vents puissants du changement qui balaient l'Afrique du Sud depuis vingt ans n'ont pas réussi à rafraîchir l'intégralité du pays. Oliver Hermanus, jeune cinéaste sud-africain dont ce Beauty a produit un bel effet à Cannes cette année, a saisi tous ces cafouillages de l'histoire à travers l'extraordinaire personnage de François. Ce robuste quinquagénaire afrikaner de la bonne bourgeoisie de Bloemfontein vit un interminable calvaire pour donner une image de lui-même conforme à ce qu'on attend de lui. Comme tous ses amis et les membres de sa famille, François est un beauf ordinaire : macho, conservateur et raisonnablement raciste. Sauf qu'il aime les garçons, ce qui n'entre pas dans le champ des possibles de la douce banlieue où François vit avec femme et enfants. Dans une étouffante scène inaugurale, presque totalement silencieuse, il apaise ses indicibles souffrances en se réfugiant dans une ferme isolée, en compagnie d'autres hommes blancs aussi honteux que lui, pour la partouze la plus lugubre qu'on puisse imaginer.
Courage. «J'ai construit ce personnage de François avec empathie, en m'interrogeant en permanence sur la manière dont je pourrais me comporter si, comme lui, j'avais dû subir dans ma jeunesse le poids des conventions de son monde», explique Oliver Hermanus. Ce que dit le film à ce moment, traçant une logique implacable et invisible, c'est qu'homophobie et racisme, fléau qui définit ce pays pour longtemps encor