«Le Chili est un pays très centralisé. Valdivia, la ville où se passe le film de Cristián Jiménez, a une grosse université et une belle vie intellectuelle. […] C'est dans le Sud, et il pleut beaucoup. Donc, soit tu déprimes, soit tu crées. Ou les deux…» Nous voilà prévenus. Dans Bonsái, on regarde par la fenêtre la pluie tomber à seau (300 jours par an, paraît-il, la météo est à la trombe), on regarde le sol, la page blanche, la voisine, l'horizon flou et la plante en pot. Quand on entend le mot «littérature», on sort son petit pistolet à eau et on se le met sur la tempe, en s'envoyant un jet tiède dans l'oreille.
Bascule. Proust n'est jamais allé au Chili : il s'est arrêté à Venise, il a pris froid en dépit du manteau de fourrure en plein été et il s'est recouché de bonne heure. Julio (Diego Noguera, champion de l'understatement), l'antihéros du film, essaie de lire le premier tome de la Recherche, seul, allongé sur la plage. Au bout du premier paragraphe, il s'endort et le soleil, farceur, dessine sur sa peau la forme du livre ouvert qu'il a posé sur sa poitrine. Gag, cut sur le visage de la fille qui voit ça, ne rit même pas.
Jiménez n’est pas Woody Allen ou Blake Edwards : il dispose les éléments du comique de l’existence foireuse, mais l’énergie lui manque pour actionner la bascule à chute qui reste béante à mi-parcours, absurde avec les personnages saisis dans tout leur déséquilibre mais incapables de tomber. D’ailleur