Lorsque le cinéma français se met en devoir d'endosser l'habit du justicier pour dénoncer les vilains dossiers noirs de la République, ce n'est pas forcément bon signe. D'éminents spécialistes comme Costa Gavras ou Yves Boisset savent bien que l'exercice, en dépit de la meilleure volonté du monde, consiste surtout à prêcher des convaincus. Par un curieux effet miroir et avec un retard à l'allumage de plus de vingt ans, la télévision, surtout à travers les productions historiques de Canal +, a fini par trouver dans cet inépuisable vivier matière à de convaincantes fictions. Entre autres sujets abordés ces dernières années, la collaboration (93, rue Lauriston de Denys Granier-Deferre), les lynchages du 17 octobre 1961 (Nuit noire d'Alain Tasma) ou les magouilles sanglantes du SAC (Des hommes dans l'ombre de Thomas Vincent), sans oublier le remarquable Carlos d'Olivier Assayas.
Cynisme. Le propos n'est pas anodin à propos du film de Mathieu Kassovitz, qui entend faire un peu de lumière sur les circonstances du massacre d'Ouvéa. Le film répète - et c'est tout sauf inutile - ce que chacun devrait savoir : que, le 5 mai 1988, 19 indépendantistes kanaks et deux soldats du 11e Choc ont trouvé la mort lors de l'assaut donné aux insurgés repliés dans une grotte. Ceux-ci détenaient une trentaine d'otages, des gendarmes faits prisonniers quelques jours plus tôt lors de l'attaque sanglante d'une caserne se soldant par quatre