Le jeu typographique qui s'étale sur la couverture de ce beau livre, comme on dit à Noël, n'est pas une coquetterie. Le «Road-Movie» en lettres épaisses, suivi d'un «USA» en caractères plus modestes, est une astucieuse mise en scène d'un pléonasme vieux comme le genre auquel le livre est consacré. Le bitume craquelé de la route, la poussière de la piste, les convois qui traversent les prairies, les bagnoles, camions, motos, chevaux voire tondeuse à gazon chez Lynch ou bateau à roulettes chez Sarafian, et tous ceux qui les conduisent, ne constituent pas seulement une partie du cinéma américain ou le corpus d'un genre. Le road-movie, c'est l'Amérique tout entière. Comment pourrait-il en être autrement pour une nation fondée et modelée par les vagues d'émigrants, bien obligés d'aller chercher au-delà de toutes les frontières une terre que personne ne leur a promise ?
Pionniers. Cette contradiction entre le mythe aventurier de la conquête de l'Ouest et la glorification du sol natal par tous ceux qui, sitôt installés, oublièrent leurs origines est, pour les deux auteurs, l'un des principes fondateurs du road-movie. Un paradoxe que Jean-Baptiste Thoret et Bernard Benoliel pointent à travers le premier film évoqué dans le livre : le Magicien d'Oz. Un road- movie, un vrai, tant les aventures de Dorothy, à la recherche d'une réalité semblable mais plus séduisante que sa ferme en noir et blanc du Kansas, ne serviront qu'à lui faire avouer que