Que David Cronenberg s’intéresse à la psychanalyse relève du truisme : ses films n’ont cessé d’explorer le thème de la construction de l’identité et de ses bouleversements. Qu’il entreprenne un film consacré aux relations entre Freud et Jung, sur le ton de la rigoureuse reconstitution historique, était plus intrigant tant le cinéaste canadien s’est toujours tenu à l’écart de cet exercice casse-gueule. Or, bien entendu, il ne s’agit pas d’un choix par défaut. Le réalisateur accomplit un subtil tour de passe-passe, revendiquant, jusque dans sa promo, l’authenticité de chaque événement à l’écran, tout en truffant son ouvrage, l’air de rien, d’ambiguïtés, de non-dits et de microscopiques procès d’intention entre les icônes de la psychanalyse, formant une trame qui conduit le spectateur, presque naturellement, à une interprétation de leurs relations.
Pour parvenir à cette dentelle délicate, Cronenberg s’est appuyé sur la pièce de Christopher Hampton, également auteur du scénario. Et il ne craint pas de manier un certain didactisme théâtral, soulignant, à travers ses scènes dialoguées notamment, le caractère oppressant d’une époque où tout est verrouillé à double tour, depuis la place des femmes jusqu’aux étouffantes manières bourgeoises en passant par le clivage à peine perceptible entre Freud le juif et Jung le protestant. L’idée centrale de la pièce, reprise à son compte par Cronenberg, repose sur un personnage qui se tient au milieu du «couple» Freud-Jung. Sabina Spielrein (Kei