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Libération
critique

Pénis sois-tu, Clint Eastwood

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L’ouvrage de Stéphane Bouquet confronte le cinéaste à son ego et à son phallus. Raide.
publié le 11 janvier 2012 à 0h00
(mis à jour le 12 janvier 2012 à 11h40)

Ce qui semble, de prime abord, compter dans le (faux) petit livre que Stéphane Bouquet, ex-critique aux Cahiers du cinéma, consacre à Clint Eastwood, c'est le fucking introduit entre le prénom et le nom du cinéaste. Ce fucking ne vaut pas seulement pour désignation des manières expéditives de l'inspecteur Harry, non, il vise immédiatement ce qui fâche : le pénis.

La première page du livre, qui a l'intelligence de ne plus s'embarrasser des préliminaires chiants qui entourent généralement un texte consacré à une œuvre dont tout porte à croire, vu la morbidité mythologique qui en émane, qu'elle est pour ainsi dire constituée, est de ce point de vue-là éblouissante : Bouquet décrit en ouverture une scène d'Un monde parfait où une grande brute dit à un petit garçon : «Tu n'as pas de père, tu as une petite bite.» Voilà, tout part de ça. Et il se tisse à partir de là un portrait d'un Eastwood, pourtant parangon avéré de virilité, mais produisant, à partir d'Impitoyable (soit avec l'arrivée de la soixantaine), des films de plus en plus «incertains d'eux-mêmes», où la chute du phallus fait partie intégrante du programme.

Cette perte n'est que le point de départ d'une interrogation plus vaste de Eastwood sur le pouvoir (ainsi, J. Edgar«le pouvoir des hommes est peut-être un signe de leur castration»), mais où, au fur et à mesure que Eastwood perd en virilité, il finit par gagner en mythe. C'est l'étrange, fascin