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portrait

Tony Gatlif, toujours partant

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Portraits, Cannes 2012dossier
A 63 ans, le cinéaste, ex-petit voyou né à Alger et héraut de la culture gitane, livre un film sur les Indignés.
Tony Gatlif. (© Yann Rabanier)
publié le 9 mars 2012 à 0h00
(mis à jour le 12 mars 2012 à 18h28)

On reconnaît tout de suite Tony Gatlif, même si on ne l'a jamais vu. A ses côtés, Betty, la migrante qui surgit de la mer, dans Indignados, son nouveau film, où elle regarde, presque ahurie, les manifestations des Indignés, en Grèce, en Espagne, en France. Betty, qui n'est pas actrice, mais assistante sociale, dit : «Heureusement que ce n'est pas toi qui m'a repérée dans la rue. Avec ta gueule d'enfer, je serais partie en hurlant.» Quand il était ado, dormant dans les squares parisiens, se baladant, «la gueule d'enfer» de Tony Gatlif faisait déjà des ravages : toutes les trois heures, il se faisait arrêter. «Bon, jusqu'à dix-huit ans, j'étais un voyou.» Maison de correction pour trafic de tours Eiffel, foyer, sans compter le bidonville à côté d'Alger où il a grandi jusqu'à sa fugue en France à 13 ans : sa jeunesse se passa plutôt en collectivité.

Ce pourrait être une allégorie de la liberté individuelle : une vie qui nous montre qu'on peut transcender toutes les situations, éponger toutes les cultures, pourvu qu'on soit suffisamment généreux pour accepter ce que les autres donnent. Sauf que pas du tout : aujourd'hui, le jeune délinquant serait prisonnier des nouvelles lois sur les mineurs. Et Tony Gatlif n'a jamais l'indécence de tirer gloire de son parcours extraordinaire. La rencontre commence par un aveu d'échec : «J'ai tout raté. En trente ans de cinéma, je n'ai pas réussi à faire reconnaître le génocide des Roms. Ils ont été enviro