Menu
Libération
Critique

«Le policier», pas de quartier

Article réservé aux abonnés
Un premier film qui tire, au gros calibre, un portrait polémique de la société israélienne.
publié le 28 mars 2012 à 0h00

L’étonnant premier film de Nadav Lapid se présente à l’image de la société qu’il entend figurer : fracturé en son centre, sillonné de lézardes, constellé de grosseurs effrayantes - ici le ventre démesurément énorme de l’épouse enceinte du policier du titre, clouée sur son canapé ; là cette tumeur mortelle de l’un des flics à qui ses camarades, qui le savent condamné, voudraient faire endosser la sordide responsabilité d’une bavure raciste.

Un organisme malade, vicié, voilà le portrait le plus séditieux qu’un jeune cinéaste israélien puisse tirer de son pays. Une nation rivée au culte de ses corps, ceux de ses superflics et soldats en tête, où le film fit l’objet de vives controverses, frisant la censure gouvernementale avant de s’adjuger un prix spécial du jury au festival de Locarno.

Primates. Dans le Policier, la société israélienne est saisie à rebours des représentations d'usage par son cinéma d'auteur célébré à l'international. Soit par le mal intérieur qui l'empêche de faire corps, justement ; conflits de classe et fractures idéologiques, loin de la question palestinienne ici reléguée en lointaine périphérie du récit. Le film se fait une vivisection hors règles, à laquelle Lapid donne une forme ternaire et rigoureusement arithmétique - thèse, antithèse, trouble.

Pile, il y a les flics. Ici, une brigade spéciale d'intervention antiterroriste, soit des hommes, des vrais, confits dans l'habitus d'une virilité rance et brutale, hypersexualisés, bêtif