Wes Anderson a une phrase amusante, qu'il répète : «C'est étrange que l'on m'identifie à ce point à mes films.» Il dit cela assis poliment sur le bord d'un canapé, vêtu du même costume à velours grosses côtes, exactement le même que celui du renard-héros de son précédent film d'animation, Fantastic Mr. Fox. Il dit cela alors qu'il vient de nous expliquer que, pour préparer son nouveau film, Moonrise Kingdom (sorti hier et projeté en ouverture à Cannes), il a envoyé sa mère en repérage dans son ancienne école primaire. Mission : retrouver les archives photos d'un spectacle où Wes et ses frères, gamins, jouaient déguisés en animaux. Elle a réussi, les costumes ont été reproduits dans le film. A l'époque, Wes jouait la loutre, son frère aîné l'élan. Il aurait préféré faire l'élan. Lancez-le là-dessus, et il vous décrira la fourrure, les jupes de la prof de théâtre, les livres qu'il lisait à 12 ans. Hypermnésique de l'enfance et contraint à tenir des carnets pour se souvenir de la semaine dernière.
Jeux. Avec Moonrise Kingdom, son septième film, échappée aventurière de deux gosses amoureux, il s'est autorisé la plongée dans cette mémoire vive. «Les faits sont inventés, mais les émotions sont celles que je ressentais à cet âge. Avoir 12 ans et tomber amoureux, c'est un sentiment démesuré, parce que vous ne l'avez jamais connu